Peur sur Dakar !
Le gouverneur de Dakar, Al Hassan Sall, a réuni avant-hier, mercredi 20 avril 2022, les différentes parties concernées par la prise en charge des inondations. La crainte et la peur sont les sentiments les mieux partagés
La rencontre tenue à la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture (CCIAD) de Dakar avant-hier, mercredi 20 avril, par le gouverneur Al Hassan Sall, a fait ressortir plusieurs problèmes pour pallier les risques d’inondations. L’administration territoriale a fait le point sur plusieurs réalisations annoncées et qui ne sont pas faites. Pendant ce temps, le Train express régional (TER) a été mise en circulation, sans que les préalables requis ne soient assurés. Il y a aussi la forêt classé de Mbao, réceptacle des eaux de pluies et point de passage d’infrastructures de transport, qui est envahie par l’eau et dont aucune structure de l’Etat ne veut endosser la responsabilité de la gestion.
RUFISQUE, KEUR MASSAR, DAKAR-PLATEAU : Préfets et sous-préfets sonnent l’alerte
Le gouverneur de Dakar, Al Hassan Sall, a réuni avant-hier, mercredi 20 avril 2022, les différentes parties concernées par la prise en charge des inondations. La crainte et la peur sont les sentiments les mieux partagés. Le sous-préfet de Dakar-Plateau, Djiby Diallo, a déploré le fait que les actions entreprises soient abandonnées une fois l’hivernage écoulé et que d’autres soient initiées à chaque saison des pluies. Il a aussi demandé une prise en compte parfaite des points bas sur le long des projets d’infrastructures comme le Bus rapid transit (BRT). Djiby Diallo souhaite aussi que le matériel pour évacuer les eaux soit disponible à temps, afin de faciliter les interventions. Djiby Diallo appelle également la Senelec prendre en compte les poteaux électriques pour éviter les électrocutions. Aussi des dispositions doivent-elles être prises pour faciliter la circulation des usagers dans le centre-ville, à cause de la ruée vers la gare de TER et les travaux du BRT à hauteur de la gare de Petersen. «Il est aussi important de prendre en compte les bâtiments en ruine», ajoute-t-il. Le préfet de Keur Massar, Sahite Fall, a mis en garde contre d’éventuels troubles, ne souhaitant pas que le spectre de l’année dernière se reproduise. Il déplore les bassins de rétention remplis d’herbes sauvages et qui ne sont toujours pas curés. Sahite Fall souhaite aussi que des mesures soient prises pour que les ouvrages de drainage des eaux pluviales ne soient plus utilisés pour l’évacuation des eaux usées. Le préfet de Rufisque, Serigne Babacar Kane, craint le pire pour son département. Et pour cause, des engagements de l’année dernière ne sont toujours pas respectés. Les difficultés portent notamment sur la construction d’un bassin à la sortie à l’unité 9 de l’autoroute à péage, une doléance vieille de 2 ans qui n’est toujours pas satisfaite. La canalisation de Zac Mbao ne peut pas soulager la population de la cité Sipres ; d’où la nécessité de la renforcer. La sortie 10 est dans la même situation, faute d’une canalisation adéquate. Les populations ont créé des bassins anarchiques. Des quartiers comme la Cité des Enseignants, Niakoulrab et Darou Khoudoss sont devenus les points de chute de l’eau qui ruissèle de Keur Massar. Selon Serigne Babacar Kane, «si rien n’est fait, les inondations vont se prolonger et la route de Niague serait coupée.
«CE QUE NOUS VOYONS SUR LE TERRAIN NE NOUS RASSURE PAS»
Le sous-préfet de Yeumbeul a fait la même alerte. Selon Khadim Gueye, les aménagements annoncés à Yeumbeul n’ont pas été réalisés. Conséquence, la sortie vers la route des Niayes va être difficile avec les désagréments ultérieurs qui seront causés par la station de Yeumbeul. La voie est une route sablonneuse qui cause des accidents. Elle devrait être bitumée, comme annoncée ; ce qui n’est pas le cas. «Ce que nous voyons sur le terrain ne nous rassure pas», constate-t-il. Avant de reconnaitre que les travaux du bassin de Yeumbeul, annoncés depuis l’année passée, ne pourront pas aussi être réalisés d’ici le début de la saison des pluies. La route Asenca-Gadaye, étroite, devrait être remise en état. Ce qui n’a pas été fait. A cause de son étroitesse, les problèmes surgiront, après les pluies. Khadime Gueye souhaite aussi que le réseau de la Cité Comico soit connecté à celui de Boune. Il demande la démolition des maisons abandonnées, qui causent d’énormes problèmes sécuritaires. Aux Parcelles Assainies et Cambérene, l’autorité administrative veut des solutions notamment sur la route Ndiaga Mbaye. L’Ageroute s’est engagé à répondre favorablement aux doléances formulées, surtout à Rufisque.
STAGNATION DE L’EAU DANS LA FORET DE MBAO : Une négligence étatique à haut risque
Beaucoup d’ouvrages de drainage des eaux de Keur Massar et environ se jettent dans la forêt de Mbao, dans le marigot. Et le point de situation de ce réceptacle des eaux pluviales dressé hier, lors de la rencontre préparatoire de la saison des pluies est peu rassurant. En effet, ce sont les équipes de l’APIX qui ont été les premiers à sonner l’alerte. Une photo prise à la date du vendredi 15 avril 2022, montre que le marigot est rempli d’eau ; donc sa capacité de stockage en cas de pluies est quasi nulle. L’équipe de Mountaga Sy s’est inquiétée du fait que le TER traverse la zone et l’eau ne sera pas compatible avec une exploitation fortement tributaire de l’électricité. Le préfet de Keur Massar, département dont l’évacuation des eaux de pluie dépend fortement de ce marigot, est revenu lui aussi sur cette présence hydrique. Le souci majeur est qu’aucune structure de l’Etat ne s’est déclarée responsable de la gestion du problème. Une anomalie constatée par le gouverneur de la région de Dakar, Al Hassan Sall, qui signale qu’un rapport a été remis aux autorités, dans ce sens. «A ce jour, on n’a pas encore connaissance de la structure qui s’occupe de la question. Si jusqu’au mois de mai, il y a de l’eau dans la forêt de Mbao, on a de quoi s’inquiéter», prévient-il. Le directeur de l’Office national de l’assainissement du Sénégal (ONAS), Ababakar Mbaye, déplore cette léthargie. Il demande que les structures étatiques se retrouvent autour de la question afin d’harmoniser les réponses et de mieux préparer la saison hivernale.
CONSEQUENCES DES INONDATIONS : éviter les secours d’urgence, à tout prix
Le gouverneur de Dakar, Al Hassan Sall, ne veut pas de plan d’Organisation des secours (ORSEC). Il a engagé, de ce fait, toutes les structures impliquées dans la réalisation d’infrastructures au respect des engagements pour que, dit-il, «la situation de l’année dernière ne soit pas revécue et qui pousserait l’Etat à déclencher un plan ORSEC. Pour cela ajoute-til, il faut que tous les travaux se fassent dans les délais. Le gouverneur de Dakar donne aussi l’ordre que tout ce qui empiète le réseau soit déguerpi. Il dit dans ce sens que les préfets et la Direction de surveillance et de contrôle de l’occupation du sol (DSCOS) devront prendre toutes les mesures idoines afin que les promoteurs véreux soient délogés. Les maisons en ruine doivent être détruites sans concession aucune», juge Alassane Sall. «Il n’est pas question, dit-il, que des personnes indemnisées continuent d’occuper illégalement les maisons et entravent l’action publique», affirme-t-il. Le gouverneur de Dakar demande aussi aux autorités administratives de faire le recensement des routes qui nécessitent une réhabilitation ou une reprise totale. Il requiert un programme spécial pour discuter sur la ville de Rufisque puisque, dit-il, «elle est en phase de devenir un enjeu majeur dans la gestion des inondations, avec les nouveaux quartiers qui éprouvent des difficultés». Le gouverneur a aussi ordonné que toutes les constructions sur la voie publique soient démolies.
Fatou NDIAYE