Le HCCT en sursis
À l’heure du marathon budgétaire qui s’ouvre à l’Assemblée nationale ce jeudi 17 novembre, l’incertitude plane autour de l’avenir de l’institution dont le renouvellement des membres a été récemment boycotté par les députés de l’opposition
Le top de départ du marathon budgétaire 2023 sera donné ce jeudi 17 novembre 2022 par les députés de la 14ème législature qui vont examiner le projet de Loi de finances 2023 et procéder ensuite à l’adoption du budget des différentes institutions de la République. Cependant, contrairement à la routine des dix dernières années où le vote du budget de ces institutions n’a été qu’une simple formalité, la position hostile des députés de l’opposition parlementaire vis-à-vis du Haut Conseil des collectivités territoriales (HCCT) fait planer une grande incertitude au-dessus de cet exercice.
C’est parti ! Les députés de la 14ème législature vont donner le top départ du marathon budgétaire 2023 ce jeudi 17 novembre 2022. Le programme de cette première journée sera consacré à l’examen du projet de Loi de finances 2023 et le vote du budget du ministère des sports.
En présence du ministre des Finances et du budget qui ouvrira le bal de cette session budgétaire 2023, les députés, vont examiner les différentes rubriques de ce projet de Loi de finances 2023 notamment : les recettes et la dette publique. Une fois ce cap franchi, les parlementaires vont ensuite procéder à l’adoption du budget des différentes institutions de la République.
Il s’agit entre autres, de la Présidence de la République, de l’Assemblée nationale, du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT), du Conseil économique, social et environnemental (CESE), de la Cour suprême, du Conseil constitutionnel, de la Cour des comptes et de la Primature. Cependant, une grande incertitude plane sur le vote des crédits alloués à ces institutions de la République cette année au-dessus de cet exercice, contrairement à la routine des dix dernières années où le vote du budget de ces institutions n’a été qu’une simple formalité.
Et pour cause, la position radicale des députés de l’opposition parlementaire du groupe parlementaire «Libertés, démocratie et changement» de la coalition Wallu Sénégal et ceux du groupe de Yewwi Askan Wi, visà-vis du Haut Conseil des collectivités territoriales (Hcct), considéré comme une «institution budgétivore qui ne sert qu’à caser une clientèle politique» fait planer un grand doute sur le renouvellement des crédits de cette institution voire de toutes les autres.
Regroupés au sein l’inter-coalition Yewwi-Wallu, ces deux coalitions qui incarnent l’opposition parlementaire représentent 80 sièges contre 82 pour la coalition au pouvoir. Lors des élections législatives du 31 juillet, elles avaient battu campagne pour la suppression du HCCT et l’orientation des fonds alloués à son fonctionnement vers d’autres secteurs plus stratégiques et prioritaires comme la gestion des inondations.
Ainsi, pour rester conforme à cette position, ces deux coalitions avaient ainsi annoncé le 10 août dernier lors d’un point de presse leur décision de boycotter les élections de renouvellement du mandat des membres du HCCT, le 4 septembre. «L’inter-coalition Wallu-Yewwi est une inter-coalition très sérieuse, composée de personnalités soucieuses des conditions pénibles de vie des Sénégalais. Ce haut conseil ne sert à rien et les fonds qui lui sont alloués peuvent servir à soulager les souffrances des Sénégalais. C’est pour cela que l’inter-coalition a décidé à l’unanimité de ne pas participer à ces élections au HCCT», avait déclaré leur porte-parole du jour, Déthié Fall, mandataire national de Yewwi Askan Wi. Confortant cette position, Cheikh Tidiane Dièye est allé plus loin en faisant remarquer au sujet de ce boycott qu’il «ne s’agit pas d’un boycott mais d’une posture de constance puisque dans son programme de législature l’inter-coalition s’était engagée une fois majoritaire à l’Assemblée nationale, de supprimer le HCCT».
Aujourd’hui, toutes les interrogations tournent autour de la posture que vont adopter les députés de l’opposition par rapport au budget de cette institution dont ils ont boycotté les élections de renouvellement, il y a juste quelques jours. Un boycott qui avait d’ailleurs permis à la coalition au pouvoir Benno Bokk Yakaar a raflé 78 sièges sur les 80.
Le 20 octobre dernier, le chef de l’Etat a signé le décret déterminant la liste des 150 membres de cette institution en procédant en même temps à la nomination des 70 membres manquants. Parmi ceux-ci, on peut citer entre autres, le maire de Diamniadio, Mamadou Moulaye Guèye, Landing Savané leader de And Jëf/Authentique, Samba Bathily Diallo, ex-maire de Ouakam, Souty Touré, ancien ministre d’Abdou Diouf et Sg du Parti Socialiste Authentique (Psa), Maouloud Diakhate de l’Afp, l’ex-député socialiste de la treizième législature, Juliette Paul Zingua et son ex-collègue député de l’Apr, Amadou Mbery Sylla par ailleurs, président du Conseil départemental de Louga.
Pour rappel, il est prévu cette année pour la Présidence de la République du Sénégal un budget de 71,1 milliards de francs Cfa contre 72,2 milliards de francs Cfa en 2022. La Primature qui a été remis sur les rails est crédité de 29,4 milliards de francs Cfa contre 48,3 milliards de francs Cfa en 2020 avant sa suppression. L’Assemblée nationale arrive en troisième place avec 20,7 milliards de francs Cfa contre 17,2 milliards de francs Cfa en 2022.
S’agissant du Haut Conseil des collectivités territoriales (Hcct), une légère hausse a été constatée dans son budget qui passe de 8,5 milliards de francs CFA en 2022 à 9,1 milliards de francs CFA. Le Conseil économique social et environnemental (Cese) campe sur ses 7,5 milliards de francs CFA. La répartition du budget des autres institutions s’établisse comme suite : 1.233.583.600 FCFA pour le Conseil constitutionnel, 595.066.136 FCFA pour la Cour suprême, la Cour des Comptes et le Secrétariat général du Gouvernement ont respectivement 8.595.066.136 FCFA et 27.029.796.583 FCFA.
ISMAÏLA MADIOR FALL, MINISTRE DE LA JUSTICE, «Si l’Assemblée bloque le budget, le président peut promulguer…»
Invité de l’émission «Jury du dimanche» le 14 octobre dernier, chez nos confrères de iRadio et iTv, le ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, répondant à une interpellation sur la sortie du président du groupe Wallu Sénégal, Mamadou Lamine Thiam assurant que «l’opposition ne votera pas le budget les yeux fermés», avait écarté tout risque de blocage du budget 2023. «Si par exemple l’Assemblée bloque le budget, le président peut promulguer le projet de loi de finances préparé par le ministre des Finances. Si également on bloque le fonctionnement des institutions, l’article 52 de la Constitution prévoit que le Président peut gouverner par ordonnance. L’Assemblée siège mais le Président gouverne par ordonnance», avait prévenu le Garde des Sceaux. Et le ministre de la Justice d’insister, «et si les députés exigent que le Président promulgue une loi, le président peut convoquer la loi pour une seconde lecture. Et lorsque la loi est convoquée pour une seconde lecture, il leur faut un 3/5 pour briser le véto présidentiel». Cette sortie du Professeur Ismaïla Madior Fall a-t-elle été savamment orchestrée en perspective d’un éventuel blocage de l’Assemblée nationale ? Wait and see !
Nando Cabral GOMIS