Faibles revenus, cherté de la vie…: ces facteurs qui freinent l’épargne des ménages
« Qui n’épargne pas un sou n’en aura jamais deux », dit la maxime. Nombreux sont ceux qui serrent la ceinture pour garder une partie de leurs revenus. Dans les marchés et les entreprises, les ménages font recours aux tontines pour épargner de l’argent. Cependant, le faible revenu, le gaspillage dans les cérémonies, la cherté de la vie et les imprévus constituent des obstacles qui vident le peu de sous mis à côté.
En cet après-midi ensoleillé, au marché Tilène, Fanta s’affaire à calculer la somme globale des cotisations hebdomadaires qu’elle doit remettre à un adhérent. Dans ce marché, personne ne doute de la moralité de cette dame d’une quarantaine d’années. En moins de cinq ans, elle a su gagner la confiance de plusieurs vendeurs et marchands. « Dans notre tontine, les cotisations de 2000 FCFA se font chaque jour, et tous les dimanches, un adhérent reçoit 1, 5 million de FCFA », confie-t-elle.
L’épargne est la part du revenu dont a bénéficié un ménage et qui n’a pas fait l’objet d’un emploi en consommation. Dans le contexte sénégalais, elle n’est par une partie du revenu inemployée, mais résulte de décisions conscientes. A Dakar, les ménages font recours à plusieurs types de tontines pour épargner. Souvent avec des appellations diverses : « Nattou cogne », « Nattou marché », « Ndeye diké », etc. la tontine dite « Nattou marché » reste la plus importante pour les individus, car elle regroupe des hommes et des femmes qui travaillent dans un lieu de commerce. D’après Fanta, cette somme permet au bénéficiaire de développer son commerce ou sa production. « Les moins ambitieux gaspillent leur pactole dans des cérémonies et se retrouvent avec zéro franc », ajoute-t-elle.
Cette forme de tontine se différencie de celle que gère Adja, au marché Castors. La dame de nationalité guinéenne, travaille comme les structures bancaires. Une tontine que l’on peut considérer comme une banque ambulante. Dès 9h, Adja fait le tour de tables de ses clients pour encaisser leur argent durant un mois. A la différence de la tontine dite « Nattou marché », la guinéenne perçoit à la fin de chaque séance mensuelle, 1% de taux d’intérêt sur le pactole du client.
Les facteurs bloquants de l’épargne
La première source d’épargne la plus connue est celle des ménages, appelée l’épargne privée individuelle. La décision peut être imposée par une personne à elle-même. De nombreux ménages ont le désir et la volonté d’épargner mais sont incapable de le faire. D’aucuns ne vivent qu’avec leur faible revenu, il est difficile de mettre de côté l’argent. C’est le cas de Saliou, un jeune peintre qui a tenté d’épargner à maintes reprises, mais n’y est toujours pas arrivé.
« Je suis conscient qu’en épargnant une somme d’argent quotidiennement, ne serait-ce que 500 francs par jour, je peux réaliser beaucoup de choses. Le problème est que je vis au jour le jour. Parfois je suis au chômage. Et il existe des besoins à satisfaire en priorité avant de songer à épargner », regrette-t-il, impuissant. C’est l’argument qui revient souvent. A cela viennent s’ajouter les imprévus qui amoindrissent les chances d’épargner. « À la fin du mois, je peux décider de mettre de côté le quart de mon salaire. Malheureusement, je peux recevoir à l’improviste l’appel d’un parent pour lui venir en aide. Nous sommes au Sénégal où la solidarité est très ancrée. On ne peut pas ignorer quelqu’un qui est dans le besoin », a dit Binetou, gérante dans une Pme.
La cherté de la vie et les imprévus font partie des facteurs qui freinent les particuliers dans leur volonté de garder de l’argent pour une longue durée. Issa Touré, la quarantaine, travaille dans une structure où il est bien rémunéré. Son calvaire dans la famille est qu’il est le seul qui soit dans une situation plus confortable. « Je ne peux pas épargner, car tout pèse sur mes épaules : les dépenses alimentaires, le loyer, les frais de scolarité… Je me retrouve avec zéro centime. Parfois je m’éloigne de la maison pour méditer un peu sur ma situation financière », a relaté M. Touré.