Commerce du blé: “la domination russe va perdurer”

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Forte d’une récolte exceptionnelle de blé après celle, record, de l’an dernier, la Russie promet de continuer à “dominer” le marché en 2023-24, en dépit des incertitudes pesant sur la sécurité de la navigation en mer Noire, selon le cabinet Agritel (groupe Argus Media).

“La domination russe va perdurer et elle est nécessaire dans un équilibre mondial précaire”, a déclaré Alexandre Marie, chef analyste pour les marchés agricoles chez Agritel, lors d’une conférence de presse jeudi à Paris.

La production mondiale de blé, céréale qui sert à la fabrication du pain, devrait être moins abondante en 2023-24 du fait d’un repli de la production au Canada et en Europe, selon des estimations publiées par le ministère américain de l’Agriculture dans son rapport mensuel “Wasde” en août.

L’offre mondiale de blé va reculer marginalement de près de 3 millions de tonnes à 793,37 millions, et les stocks se contracter légèrement.

Dans ce contexte, la Russie conforte sa place de premier exportateur mondial, avec “une capacité d’export de 49 millions de tonnes de blé”, soit 23% du commerce mondial, – pour une production estimée à 87,5 millions de tonnes -, “largement au-dessus de la moyenne des cinq dernières années”, selon Agritel.

“La région de la mer Noire, de la Russie à la Bulgarie en passant par l’Ukraine et la Roumanie, représente 40% des exportations de blé dans le monde. Aujourd’hui, 30% des capacités d’export de la mer Noire sont à l’arrêt (correspondant aux ports ukrainiens d’Odessa, Mykolaïv, Berdiansk et Marioupol) et 54% sont à risque à la suite de l’escalade des tensions”, selon Alexandre Marie.

 “Résilience” de l’agriculture ukrainienne –

Les bombardements russes contre les infrastructures portuaires ukrainiennes visent notamment les ports fluviaux de Reni et Izmaïl sur la route du Danube, tandis que les tirs ukrainiens menacent potentiellement le trafic via les ports russes de Rostov-sur-le-Don (mer d’Azov) et de Novorossisk (au sortir du détroit de Kertch).

Trois autres ports importants en mer Noire sont actuellement en activité et ne sont pas menacés, ceux de Constanta, en Roumanie, et Varna et Burgas, en Bulgarie.

La Russie s’est imposée ces dernières années sur le marché international, rassurant les importateurs par la régularité de sa production et la qualité de ses blés, vendus peu cher, tout en améliorant sa capacité de livraison. Pour elle, comme pour la sécurité alimentaire mondiale, le plus grand risque aujourd’hui est celui de la sécurité maritime, souligne l’expert.

Il relève par ailleurs la “grande résilience” des agriculteurs ukrainiens, Agritel évaluant à 20,5 millions de tonnes la production ukrainienne de blé pour 2023-24, contre 21,5 millions la campagne précédente et 33 millions en 2021-22, avant l’invasion russe.

Globalement, l’offre de blé meunier reste “conséquente en Europe continentale” (UE, Russie et Ukraine), en dépit du “déclassement” d’une partie plus importante que d’habitude de la production de blé meunier en blé fourrager (pour l’alimentation des animaux) du fait de pluies tardives.

La France devrait tirer son épingle du jeu, avec une production de près de 35 millions de tonnes de blé tendre, dont au moins “17 millions disponibles pour le marché export”.

“Ces derniers jours, le blé français redevient compétitif par rapport au blé russe – qui voit augmenter les primes d’assurance liées aux risques de guerre -, avec l’espoir d’une reconquête de ses marchés traditionnels en Afrique du Nord, et de potentiels achats par la Chine qui a vu ses qualités de blé meunier diminuer après des pluies.

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